Frédéric de Nexon
CONEY ISLANDFrédéric de Nexon
Frédéric de Nexon, né à Paris, en 1962, développe très tôt un goût prononcé pour l’Art.
Passionné autant de littérature que de peinture ou de musique, il est aussi attiré par le cinéma. Il va alors entamer un parcours au sein de cet univers protéiforme, mettant en scène documentaires, courts-métrages, écrivant des fictions pour le petit et le grand écran.
Son insatiable curiosité le mène en des périples géographiques et des aventures mentales qui organisent peu à peu un puzzle conforme à cet esprit libre.
Appréciant les choses et les gens de façon toujours oblique, il était sans doute écrit que son regard plein d’ironie, mais non dénué de tendresse, le mène, un jour ou l’autre, vers cet univers de la photographie où capter un moment, un mouvement, un sentiment fugace est la marque des plus grands.
Vivant les moments de la vie en amateur éclairé et en honnête homme dans un monde qui se gargarise à satiété du terme de professionnel pour masquer un déficit de sens, Frédéric de Nexon capture d’un œil original, vierge pourrait-on dire, les instants mouvants d’une société qui se dérobe. Il donne à ses photos, une dimension décalée, onirique, qui paradoxalement dévoile une vérité certaine.
A l’instar du peintre fou joué par Le Vigan dans « Quai des Brumes », Frédéric de Nexon « peint » malgré lui « les choses cachées derrière les choses!… Un nageur, pour moi, c’est déjà un noyé… »
Au cœur sauvage de l’Amérique préexiste ce mythe fondateur de la Nouvelle Frontière. Il s’est brisé lorsque les pionniers ont atteint la Californie et heurté le barrage du Pacifique. Ils ont alors occupé un territoire mental, qu’ils ont nommés Hollywoodland, propice à imposer aux autres nations, comme une invasion sans cesse renouvelée, à la vitesse circulaire d’un boomerang, des supercheries toujours plus délirantes. Tels les poètes grecs embarqués dans leurs Odyssées, tels les acteurs élisabéthains fatiguant de leurs mystères les routes de l’Angleterre, tels les feuilletonistes XIXème français et leurs dandys de collègues anglais, les Américains, ces accros du story-telling, sculptent, depuis cette heure née faste, leur propre légende au fur et à mesure qu’ils en sapent les fondations. La parade, magique, enchantée, magnifiquement muette, est passée, mais le cirque continue. Des taxis volants steampunks en route to the moon ou Coney Island, aux super-héros protéiformes – Terminator-cop, Sweet-bikini-teens, Hancock-homeless –, des ciels faussement peints aux peintures vives des ruines embellies, voici l’instantané refoulé d’une Amérique que Kafka cauchemardait en Grand Théâtre de l’Oklahoma quand Hollywood, archéologue arc-en-ciel, l’inventait en Olympe carton-pâte. Ces instantanés qui assemblent ces citoyens Technicolor made in USA dans leur propre schizophrénie veulent montrer, que s’il n’y a pas de second acte dans la vie d’un Américain, il reste toujours la possibilité d’une saison en enfer.